1909 - 2000
En art, jeunesse de coeur (et d'esprit) ne correspond pas nécessairement à la jeunesse du visage.
L'ami Marcel Mélot le prouve abondamment. Le temps qui a éclairci son crane et quelque peu marqué sa figure, n'a as eu de prise sur son éclatante créativité.
Homme du Nord (né par "hasard" à Bruxelles en 1909), à Maubeuge que fréquente la grisaille, il reçoit pour premier jouet une boite de couleurs "sans danger" ("le danger viendra après"), il suit quelques cours de dessin et accepte de ses ainés des suggestions.
Mais tetu en diable et l'oeil vif, aux aguets, il n'a jamais cessé de travailler qu'en solitaire volontariste. Il signait rarement ses peintures. Une volonté que son esprit de recherche, de culture, sa perpétuelle quete de l'ame des choses ont façonné en de multiples facettes toujours éclatantes d'originalité.
Des oeuvres figuratives ? Elles sont légion jusqu'en 1980, depuis les petits croquis, les pastels, jusqu'aux peintures dont on peut admirer quelques exemples aux musées de Maubeuge et d'Avignon.
Ardeur et révolte trouvent un écho dans la découverte de l'oeuvre de Rouault chez Louis Carré en 1946 et la conquete de l'espace dans l'oeuvre de Nicolas de Stael à travers la rétrospective de 1963. Ces grandes lignes de force de toute sa création sont appuyées par la corresondance avec BOEZ alors conservateur du Musée de Maubeuge, par la rencontre de Henri Dupont collectionneur et marchand qui le forme à l'art moderne et d'Eugène Leroy pendant la période Lilloise de 1938 à 1946 qui précède l'installation à Saumane (84). Installation qui suit le renoncement à l'achat du "Vieux Roi" de Rouault : Mélot avait alors le choix entre cette oeuvre et une fermette à Saumane. Marcel et Jeanne son épouse ne quitteront plus Saumane. C'est à Gordes en 1948 qu'il rencontre André LHOTE à l'Isle-sur-la-Sorgue, VAN ROGGER, peintre de l'absolu à qui il voue une grande admiration.
"L'interrogation" des oeuvres contemporaines se poursuit au long de ses recherches et conduit Marcel Mélot à l'abstraction, puis à une figuration renouvelée combien plus habitée que les manifestations de mode que l'on peut voir dans des lieux "consacrés'.
Les coups de coeur vont au peintre Rebeyrolle découvert à l'ancien Hospice Saint-Louis d'Avignon, à Clavé et à Tapiès. Marcel Mélot ne cesse de regarder l'empreinte de notre monde sur les créateurs contemporains et dans son grand age conquiert cette écriture unique servie par une énergie peu commune.
Ce que l'on qualifie absurdement "d'abstrait" s'impose par des toiles de grandes et de moyennes dimensions qui sont la résultante de ses observations intérieures et extérieures. Elles témoignent d'un esprit bouillonnant, révolté contre les absurdités et les duretés de notre monde. Faut-il rappeler les "serpillères" de 1980, les "grilles" de 1982, la série des aquarelles où se retrouvent le jaune de l'espoir et les noirs de ses réflexions, les oeuvres récentes parcourues d'éclairs et les tetes brisées en quelques touches où dominent des regards chargés d'anxiété, d'interrogations, ceux de l'homme inquiet face à son destin, face à la mort ?
A quoi bon énumérer ses expositions au gré de ses déplacements dans le Nord, dans la région Parisienne, dans le midi ? Il convient cependant de rappeler, après son grand prix de la ville d'Avignon, son exposition au Palais de l'Europe à Menton, sa rétrospective de Saint-Rémy, ses prestations toutes proches à l'Isle-sur-la-Sorgue chez Djellal, à Salon chez Goubin et sa participation aux Foires Internationales d'Art Contemporain de Stockholm et de Bologne en 1986.
Abstrait ou figuratif, Marcel Mélot aboutit à une réalité invisible, celle des différents états du moi et de l'ame. Cette réalité invisible est elle meme soutenue par les différents états de la matière tels que la terre, le ciel, l'air, le soleil, y compris ceux de la matière à peindre : lavis, jus, empatements, zébrures au tube. Le triptyque abstrait "l'homme de la terre" qui évoque si bien notre terre dont les aspects restent proches du minéral.
C'est dans l'accomplissement et le dépassement des pulsions dont chacune ne veut reconnaitre qu'elle-meme, que l'essentiel se dégage des tetes en quelques signes "un oeil, un nez, un front", portraits mythiques, archétypaux d'une foule qui s'avance pour un éternel "Enterrement de la sardine" (Goya).
Ainsi, Marcel Mélot d'une figuration informelle est allé vers une figuration sublimée des forces de la matière dont l'harmonie acquise au privilège du grand age sonde "la chambre du coeur pour en dire la hauteur, la largeur et la profondeur" et laisse entrevoir une autre terre, dénouée.